Bignous de tous les pays gonflez-vous! Le folk punk breton sonne la révolte des menhirs. Kenavo

Publié le par olivier

Un reportage de Gabrielle Culand

Bignous de tous les pays gonflez-vous! Le folk punk breton sonne la révolte des menhirs. Kenavo!
Previous imageNext image

Dans la grande marée de la nouvelle scène bretonne, les Ramoneurs de Menhirs sont en tête de proue.

A la barre des invincibles Ramoneurs de Menhirs depuis 2006: Loran, un guitariste-pirate qui n'a jamais eu peur d'affronter les tempêtes.

En 78, avec le chanteur François, il fonde le groupe-phare de la scène alternative française, les Berurier Noir.



De squatts en concerts de plus en plus tumultueux, le duo et sa bande, la Raïa, deviennent l'étendard du punk engagé, se battant contre l'extreme-droite et la répression policière.

Le groupe se sépare en 89. François part au Canada, et Loran se réfugie dans le Mercantour.

Vingt ans plus tard, leur hache de guerre refait surface en Bretagne.



Loran : Moi, il se trouve que je me suis présenté en Bretagne comme un réfugié politique qui fuit la France quoi... Déjà, voilà, j'arrivais en Bretagne... J'aurais pu arriver au pays Basque, j'aurais pu arriver en Occitanie, en pays catalan, dans une autre culture, au Chiapas, j'aurais eu la même démarche, c'est pas du tout... Ce que les gens confondent souvent, c'est qu'ils ont l'impression que la lutte bretonne, c'est quelque chose qui rétrécit, qui serait xénophobe, c'est entièrement faux ! Quand on est bien dans nos racines, on est bien avec les autres.



Loran n'a pas choisi par hasard de planter son menhir à l'ouest de la France. Comme l'Ecosse ou l'Irlande, la Bretagne, est l'un des six territoires celtes. Malgré les invasions, elle a toujours su préserver son héritage.

Après-guerre, la Bretagne fait revivre les bagadous, des orchestres ambulants inspirés des Pipe-Bands de ses cousins écossais. Soutenu par les mouvements indépendantistes, ce renouveau culturel débouche en 77 sur la création des écoles Diwan, qui réapprennent à une génération entière la langue bretonne, interdite depuis 1902 par l'état français.

Dans les années 70, la musique celtique explose. Ses stars remettent au gout du jour les instruments traditionnels comme la bombarde ou la harpe.
Les rassemblements géants, comme le Festival interceltique de Lorient, réunissent des dizaines de milliers de spectateurs, emmenés par des bardes surdoués, comme Alan Stivell ou Dan Ar Braz.



Avec son groupe Plantec, Yan emmène dans une même sarabande électro et "plinn", la danse traditionnelle bretonne. A l'origine, le jeu de jambe des danseurs de plinn servaient à tasser le sol en terre battue des maisons neuves, lors des Fest Noz, "fêtes de nuit" en breton. Ce soir, le Marilyn Manson du pays des druides fait tanguer plus de 6000 spectateurs.

Les frères Plantec "enraciné" en breton grandissent dans le Morbihan. Tout petits, ils tombent dans la marmite des Fest Noz pour lesquels ils deviennent danseurs puis musiciens.

En 2003, en rentrant en voiture de l'une de ces fêtes, Yannick percute avec son frère un pont sur la voie express. Sur son mur, il conserve une radiographie de cet accident qui a bouleversé sa vie. Plongé dans le coma, Yannick a la révélation: sa musique jusque-là folklorique doit s'ouvrir à de nouveaux horizons.



Même Brest, à l'extrême pointe ouest de la France, est gagné par la tempête du Breizh Sound. Entièrement détruite pendant la seconde guerre mondiale, cette ville portuaire est le nid douillet où s'épanouit Gimol Dru Band.

La moitié des membres du groupe a suivi sa scolarité dans les écoles Diwan où l'on enseigne en breton. Pour eux, la Bretagne est un tremplin vers le monde: le chanteur Fanch revient de 3 mois au Chili et le tromboniste Chaou (Kao), d'un séjour chez les zapatistes mexicains.

Fànch, le chanteur de Gimol Dru Band, est instituteur dans l'école Diwan de Paris. Klet, le batteur cagoulé, fait l'acteur pour des sitcom en breton.



En 71, L'A.R.B., l'armée révolutionnaire bretonne, déclare la guerre à l'Etat français. Proche des basques de l'ETA et des irlandais de l'IRA, le groupuscule revendique une trentaine d'attentats comme ici en 74 lors du plastiquage d'une l'antenne de L'ORTF, la télévision française de l'époque.

Quatre ans plus tard, l'ARB pose une bombe au château de Versailles. En 2000, un attentat attribué à la branche armée bretonne tue une employée d'un fast-food de Quévert.
Les 4 militants indépendantistes arrêtés sont acquittés. C'est la fin des attentats, et le mouvement régionnaliste trouve d'autres façons de prolonger son combat.

Pro-européens, les militants manifestent aujourd'hui pour un fédéralisme à la française. L'association 44=Breizh, 44 comme le numéro de département de la loire atlantique, milite pour que le pays Nantais soit rattaché à la bretagne. Une séparation qui date du régime de Vichy.

Trouz An Noz, littéralement "le bruit de la nuit" fait partie de cette nouvelle generation de groupes bretons radicaux. Ils chantent en gallo, la langue de Haute-Bretagne. Un choix militant selon Nico, le fondateur du groupe.

Nico : Quel est le degré de violence, enfin je veux dire, sur une échelle entre des gens qui perdent complètement leurs acquis sociaux, des gens qui se retrouvent au chômage etc.. par rapport à, je ne sais pas moi, une permanence de l'UMP, qui a été fracturée à Saint Brieux, comme ça s'est passé à la dernière manif ? Je veux dire, entre une porte cassée et une vie brisée...



Pour Trouz an Noz, la lutte bretonne n'a pas de frontière. Ils chantent même un hymne en créole au LKP, l'organisation syndicale antillaise qui lutte contre la "profitation".

Tel un Astérix alternatif, Nicolas résiste à sa façon à l'agriculture intensive qui a ravagé sa région. Quand il n'astique pas le manche de sa guitare, il bêche les cinq hectares de terres qui entourent la ferme de ses grands-parents à Plestan, en virtuose de l'agriculture biologique.

 

Tracks
mardi, 4 janvier 2011 à 05:00

En savoir plus
staff pick
Tracks

Le magazine dédié aux nouvelles tendances, cultures émergentes et décalées. Diffusé tous les vendredis soirs et samedis ...

 


Pas de rediffusion
(France, 2010, 52mn)
ARTE F

Edité le : 28-12-10
Dernière mise à jour le : 29-12-10

 
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article